Des nouvelles de Mexico #5
Les découvertes continuent ici à Mexico (et aussi à Mérida cette fois-ci). Et les surprises aussi. La question d’un coiffeur m’a d’ailleurs laissé un peu paf : « Et les gens, en Belgique, ils sont de quelle couleur ? »
L’espagnol ça commence à aller, hein. Sauf, quand, parfois, je ne comprends que le premier mot de la phrase : Favor de jalar la palanca del inodoro ! Merci de bien vouloir… et après, prrrrt, rien du tout. Et vous, vous comprenez ?
Vu le goût immodéré des Mexicains pour les merdouilles sucrées, Laurence m’explique que les fabricants de KitKat ont modifié la recette originale juste pour le pays : moins de chocolat, plus de sucre. Miam, dis donc. On va encore pouvoir grossir plus vite, güey !
Ok, d’accord, je vous entends jusqu’ici : c’est quoi, güey ? Demandons à Gérard, mon fact-checker, à qui je cède officiellement la parole pour la première fois. Gérard sait tout mieux que moi, car il vit ici, et c’est grâce à lui si mes bêtises forcent votre respect et ne m’ont pas encore fait croupir dans une geôle locale. Vas-y Gérard, étale ta science.
Ce mot spécifiquement mexicain que l’on entend à longueur de journée dans les rues revêt différents sens. Il s’agit, à l’origine, d’une insulte (qué güey que eres / tu es un idiot ; pinche güey = sale con — insulte grave), liée à sa probable origine étymologique (buey, bœuf). Toutefois, il peut servir à désigner une personne de la bande (homme ou femme), voire prendre une tonalité amicale (Qué hay güey / qu’est-ce qu’il y a, mon pote ?). Enfin, dans un récit, il peut servir de mot-relais, sorte de tic verbal vide de sens, par exemple : " O sea güey, fijate güey que el otro día güey, estábamos güey en la clase del Fajitas güey, y ¡ Güey! No sabes que mega aburridota nos pegó güey..."
¡ Merci Gérard !
Et donc, Favor de jalar la palanca del inodoro ça veut dire prière de tirer la chasse. Bon, ok, j’aurais dû vous préciser où j’avais lu ça. Mais bon, « el inodoro », franchement…
Et tant que j’y suis, terminons ici le déjà traditionnel et inévitable chapitre déjectif : partout, des annonces dans la rue proposant des baños limpios (toilettes propres). Et c’est vrai !
Carlos Slim est un des types les plus riches du monde. Il possède des milliers d’entreprises, médias, musées, etc. Cette annonce, sur l’auvent d’un restaurant de poissons, fait rigoler tous les passants : « le seul lieu n’appartenant pas à Carlos Slim. »
Je suis allé manger dans une pozoleria, un restaurant spécialisé, je vous le donne en mille, dans le pozole, une potée délicieuse (souvent avec de la viande et du maïs) qui fait partie du top 3 des trucs inoubliables ici. C’est vraiment délicieux. Existe en blanc, vert et rouge. Devinez lequel est le plus piquant.
Le soir de Noël, je n’ai rien de prévu. Je décide donc d’aller voir Matrix 4 au cinéma. Je vérifie l’horaire, tout roule. Arrivé sur place : fermé. Et le ciné voisin aussi. C’est ici que Dieu prend le contrôle de mon histoire : « Dis, Thierry, on va quand même pas projeter des trucs incompréhensibles réalisés par des transgenres le jour de l’anniv de la naissance du Petit, non ? ». Et de fait, tout est fermé ici les 24 et 25, alors qu’en Europe, on va au resto, au spectacle et on consomme à qui mieux mieux. Au Mexique, Noël a donc conservé son caractère de fête très familiale : on festoie, mais en famille et chez soi.
INTERMÈDE YUCATÈQUE
Je suis parti retrouver Charlier quelques jours à Mérida, dans la Péninsule du Yucatan. Petite ville de province où, après trois jours, on tournait un peu en rond. Mais c’était quand même très sympa et on a vu des trucs super.
L’avion vers Merida est en train de décoller. Le gars derrière moi envoie encore vite un Whatsapp, se met en mode avion et puis fait un rapide signe de croix. C’est bon, on peut quitter le tarmac.

Je tente de lire le journal local. J’y découvre, un peu consterné, cette double page.

Sur la plage de Progreso, vendeur
– Des cigares ?
– No fumamos !
– Un hamac ?
– No dormimos !
Nous visitons un site archéologique. Un gars s’approche.
– Do you want a guide ? I speak perfect broken english.
La réception de l’hôtel m’envoie un Whatsapp : Señor Thierry, pouvez-vous nous aider à prendre contact avec señor Philippe ? il a mis sa pancarte NE PAS DÉRANGER et nous sommes très inquiets de ne pas pouvoir faire sa chambre !
Sur le menu d’un restaurant, cette appellation étonnante : Caballero pobre. Cavalier pauvre. C’est du pain perdu, en fait…
A l’église de Mérida, cette annonce.
Nous tombons donc en plein pendant les confessions. Légèrement réorganisées pour cause de pandémie, vous l’allez voir.

J’appelle le restaurant pour réserver une table pour 8 heures (a las ocho). Un gars me répond : « 8 h du matin ou 8 heures du soir ? »
Déniché au marché local, parmi d’invraisemblables bondieuseries (voir le détail sur le compte Instagram), une statue de Santo Jesus Malverde, le « saint patron des narcotraficants ». Il est assis sur un tas d’or, sorte de Picsou triste et moustachu. C’était un Robin des Bois local, fin 19e début 20e. Pas certain qu’il ait vraiment existé, mais il est très connu et ça nous change des Jésus sanguinolents.
Dans un bus bondé. Deux vieilles dames restent debout. Personne ne bouge. Mais alors personne. Sauf deux crétins (polis et belges) évidemment.
Attention, polémique, ici. Un serveur nous explique que le sel et le citron avec la téquila, c’est vraiment du bullshit pour les touristes. Sa collègue, le lendemain, prétendra que non, pas du tout, c’est une coutume traditionnelle. Gros fight en perspective. Les deux s’accorderont cependant sur ceci : une tequila se déguste obligatoirement avec une bière.

Séquence émotion. On est allés visiter des cenotes, ces piscines naturelles qu’on trouve en nombre dans le Yucatan. Qui peuvent être soit complètement enterrés ou avec un orifice au-dessus. Dans le premier, complètement sous terre, on a eu la chance de nager seuls, dans un silence total. Un peu l’impression de rentrer dans le ventre de ma mère. C’est ce que j’ai vécu de plus impressionnant depuis que je suis ici.
Avant de vous quitter, une petite pub pour ce disque qui vient de sortir. Ça a l’air bien. C’est déjà numero uno ici.
La rédaction entière du Monde selon Thierry vous souhaite une année 2022 plus funky que celle qui vient de se terminer (ce ne sera pas difficile) et vous rappelle qu’il est toujours possible de faire durer le plaisir en allant s’abonner aux comptes Facebook et Instagram de notre petite entreprise. Et profitez-en : jusqu’à demain soir, c’est entièrement gratuit (par la suite aussi, en fait).