DES NOUVELLES DE MILAN
Me voici à présent dans la capitale de la mode, du design, de l’osso bucco, de la Scala et de la dernière Cène de Leonardo Da Vinci. Et puisque tous les clichés sont déjà évacués, on peut y aller.
Le Soir où j’arrive, il y a foot. L’Inter de Milan contre l’Union Saint-Gilloise. Du coup, je me fais tout petit, des fois qu’on me pose des questions traîtres sur la brasserie Verschueren (la version locale de Schield en Vriend). Je vais donc me faire discret et ne siffloter aucun hymne. Bon, plus de peur que de mal finalement : l’Union s’est fait piler 4-0 et donc je ne risquais rien, en fait.

Bien souvent, quand ils ne trouvent pas de place dans la rue, les Milanais se garent sur les trottoirs. On appelle ça le parcheggio selvaggio. Carence d’espaces disponibles ? Que nenni, en fait : d’après une étude datant de 2023, il semblerait que la disponibilité excessive de places de parking disponibles contribue à inciter les habitants à (sur)utiliser leur caisse et à ne pas vraiment se casser la tête pour le stationnement. Baaaaah, la mobilité et compagnie, c’est tous des trucs d’écolos, hein quand même !

Eric évoque les terroni et de la manière dont les Milanais et les Turinois les considèrent. En italien, i terroni — les travailleurs de la terre — est un terme familier (et souvent péjoratif) utilisé par certains habitants du Nord de l’Italie pour désigner les Italiens du Sud (Campanie, Calabre, Pouilles ou Sicile). Après la Seconde Guerre mondiale et les grandes migrations internes vers le Nord industriel, le mot a pris une connotation discriminatoire : il évoque, dans la bouche de certains, une image de gens « arriérés », « pauvres » ou « incultes ». Les guillemets ont leur importance, puisque ces mots n’engagent que les Milanais qui, bien entendu, n’en font pas partie et l’utilisent “pour rigoler”.
Ici on indique BIANCO sur les yaourts nature.
Pour les différencier avec les VERDE quand ils ont dépassé la DLC ?
Petit point sur ma maîtrise de l’italien. La conversation, ça commence à viendre. Je comprends tout et je commence à refuser que mes interlocuteurs passent à une autre langue. Poussé par mes progrès, je suis allé écouter une conférence mêlant architecture, le graveur belge Frans Masereel et Victor Hugo. Eh bien je n’ai rien compris.
Adesso è l’ora dell’aperitivo ! Au bar, tu commandes un apéro et le serveur te gave de trucs à grignoter, bouts de pizza, charcuterie, fromages, trucs chauds ou froids, focaccia, bruschetta, sandwiches garnis… ça n’arrête pas et ça épargne le dîner qui suit puisque plus faim. Cette particularité milanaise — appelée apericena — a aujourd’hui essaimé dans tout le pays.
La Madunina, statue de la vierge dorée à la feuille d’or, culmine à 108,5 mètres au sommet du Duomo, la plus grande église jamais construite en Italie (la basilique Saint Pierre se trouvant, administrativement parlant, dans un autre pays que l’Italie). Pendant longtemps, une tradition a interdit qu’un bâtiment dépasse cette statue. Fines mouches, les promoteurs des récents immeubles ont installé une réplique de ladite statue au sommet de leur propre gratte-ciel. De la sorte, techniquement, ils ne sont pas plus hauts que la sainte vierge.

Les Milanais ont une expression lorsqu’une situation semble sans fin : “Lungh ‘me la fabrica del domm”, ce qui se traduit approximativement par “aussi longtemps que la construction du Duomo”. La construction officielle de l’église cathédrale gothique a commencé en 1386 et ne s’est achevée qu’au 19e siècle, soit 600 ans plus tard. #MêmeGaudiPeutAllerSeRhabiller
A l’époque (donc avant Netflix et Pornhub), quand on allait à La Scala de Milan, il y avait des rideaux qui permettaient de s’enfermer dans sa loge. Pour y préparer à manger, y trousser sa bien-aimée ou… PARIER ! C’était en effet le seul endroit où les jeux d’argent étaient autorisés. Tous à l’opéraaaa !
Au moyen-âge, toutes les affaires se traitaient à la piazza mercanti. Et quand un commerçant ne pouvait plus régler ses dettes et se retrouvait en situation de faillite, son comptoir (banca), était publiquement cassé (rotta) pour lui taper la honte. Banca rotta a donné le mot banqueroute. Merci Professeur Thierry !
Toute honte bue, je m’autorise ici du lambrusco, une sorte de liquide pour déboucher les éviers déguisé en vin rouge italien pétillant, qui fait directement des trous dans l’estomac. Ici, ça passe inaperçu alors qu’à Bruxelles, mes amis amateurs de vin font rhoooooo lorsque j’ose aborder la question de savoir si le lambrusco c’est admis ou pas.
Tout est monumental au cimetière du même nom : la surface, le nombre de tombes, la hauteur des mausolées et même le nombre de parcours thématiques (une quinzaine) qui prennent plusieurs heures. Ici on mourait avec panache, signore !
Très amusant aussi d’arriver devant une stèle et de pouvoir dire « Aaaah, lui, il est mort dans les années 30 ou 40 », rapport à la statuaire fasciste très en vogue à l’époque (ouvrier, torse nu, famille complète, regard vers le haut, bras tendus vers l’éternité, fidélité au Duce…)

Dans le métro, au restaurant : tout le monde a son cellulare à fond, sans complexe. A chaque fois je tente un regard glacial. Ça ne marche quasi jamais.
D’habitude, dans les grandes villes fréquentées par les touristes, les annonces dans le métro sont audibles dans la langue locale et en anglais. La société des transports milanais a visiblement fait l’économie d’un speaker anglophone natif. Et donc on peut entendre avant chaque arrêt : The nextE station iZZE… »
Didier, avec qui j’ai été à l’école et qui vit ici depuis 2000 ans, va tout le temps à Monaco pour faire des affaires. Monaco par-ci, Monaco par là… Pfff, il se la pète ou quoi ? En fait, en italien, Monaco c’est… Munich !
Je viens de chercher comment on dit « a priori » en italien.
#LaHonteOuAlorsLaFatigue
On se balade dans le centre avec Stefania et Didier et notre attention est attirée par une foule, dévote, entourant une icône religieuse. Une espèce de gourou, habillé en robe de bure violette comme dans “Tintin et le Cigare des pharaons”, prend le téléphone de chacun dans la foule et fait un signe de croix avec l’appareil devant un portrait de Jésus. Il bénit donc les iPhone (seulement à partir du 12, hein, on n’est pas des bêtes non plus). Renseignement prix, il s’agit d’une congrégation religieuse péruvienne, El Señor de Los Milagros. Les Péruviens sont d’ailleurs légion par ici, ils ont apparemment le monopole des entreprises de transport et de courrier express…
Religion encore. En traînant du côté du Duomo, je croise des centaines de Flamands avec un même t-shirt : vrienden van Carlo Acutis. Et la tête d’un jeune homme avec une espèce d’auréole dans les cheveux. Je me dis que c’est sans doute un chanteur très populaire au nord du pays.

A l’entrée de l’ancienne Poste Centrale, devenue un énorme Starbucks, une gigantesque plaque de marbre reprend une liste de Milanais tombés pour la patrie pendant la Première Guerre mondiale. Un touriste demande bien fort si c’est le menu du café.
Jusqu’en 2021, il n’y avait aucune femme représentée sur les 140 statues historiques présentes dans la ville. Maintenant il y en a deux. Allez. On progresse.
Next : Venise ! #SheilaEtRingo #RefDeBoomer





Bravo !
Guilty! :-)