DES NOUVELLES DE RIO DE JANEIRO #1
Dernière étape de mon périple brésilien. Il ne m'a pas fallu deux heures pour tomber profondément amoureux de cette ville. Ça va être facile d'être heureux ici...
Quand je suis arrivé, Olivier m’a dit : “Tu vas voir, tu vas préférer Rio à tout le reste.” Et moi, pour le principe, j’ai essayé de faire le malin, genre “Mouiiiiii, on verra, Sao Paulo et Salvador c’est très bieeeeen dans leur genre, t’sais… ” mais je me suis rendu compte que je n’y croyais pas moi-même. Oui, ça va être terrible ici. Et irrésistible.
Voici un excellent exemple de surappropriation culturelle… Le chauffeur de taxi : « Vous allez voir, le Museo do Amanha est spectaculaire, c’est d’ailleurs la dernière création que notre grand architecte Oscar Niemeyer a dessinée avant sa mort ! »
En montant au Corcovado, il faut obligatoirement passer par la photo souvenir en début de parcours. En fin de visite, un type me demande si j’ai fait une photo. Euh non, senhor… Sauf que le gars, malin, s’est débrouillé pour la retrouver quand même et me courir après pour que je lui achète ma tête posant devant un christ en carton…
Un autre chauffeur de taxi : « Je crois ne pas me tromper en affirmant que la plupart des habitants de Rio de Janeiro ne sont jamais montés au Christ Rédempteur. »
Dans le métro, il y a des wagons (roses, évidemment) réservés aux femmes, les jours de semaine entre 6 et 9h et 17 et 20h.
Je ne connaissais pas l’histoire, mais je dois bien être le seul. La garota de Ipanema (the girl from Ipanema) a bel et bien existé. Dans les années 60, le compositeur Antonio Carlos Jobim et le poète et parolier Vinicius de Moraes passaient leurs après-midis à flûter du whisky et à fumer des clopes au bord de la plage et fantasmaient sur une jeune femme qui passait par là tous les jours : Heloísa Eneida Menezes Paes Pinto. Elle n’a su que très tard que c’était elle la « muse » des deux hitmakers. Son mari a été jaloux pendant des années des millions de fans qui fantasmaient sur elle.
Une nation entière en flip flop… c’est l’une des images les plus marquantes dès qu’on arrive au Brésil : tout le monde, riche ou pauvre, jeune ou vieux, se balade en tongs. Moi, trente secondes avec ça et j’ai des cloches aux pieds. Mais visiblement, ça n’arrête pas les Brésiliens. 94% d’entre eux possèdent ou ont possédé une paire de Havaianas, la marque fétiche aux mille couleurs. Qui n’ont pourtant jamais varié de teinte (bride bleue, semelle blanche et bleue)… jusqu’à une fatale erreur de fabrication qui a ouvert la porte à des tas de variations !
L’histoire de Marielle… Un peu partout en ville ,on trouve des tags, des posters, des graffitis : qui a tué Marielle Franco ? Cette militante a été assassinée il y a 5 ans et l’enquête n’a jamais abouti. Bisexuelle, très engagée dans la lutte féministe, pour la négritude, les droits humains, les favelas et les droits LGBT, elle emmerdait visiblement tellement de gens que les suspects sont légion.
Azota et Olivier sont Suisses et voulaient venir au carnaval de Rio. Un souci médical les en a empêchés. En échange, ils sont donc allés au carnaval de Monthey (Valais, région du Chablais). Oui, je sais, moi non plus je ne connais pas, t’inquiète. Toujours est-il que j’ai trouvé super mimi qu’ils trimballent quelques confettis de leur carnaval local jusqu’à un bar où nous avions une vue imprenable sur la plage de Copacabana. Et Azota a jeté quelques confettis dans sa caipirinha. « Car si tu n’as pas de confettis dans ton verre, c’est que tu as raté ton carnaval de Monthey ! ».
Flamengo, le club carioca qui joue au stade Maracanã, a gagné ce soir et Olivier a entendu des coups de feu en ville pour célébrer la victoire. Sympa. Bon esprit.
On mange dans la rue. A nos pieds, les cadavres des bouteilles qu’on a éclusées. Pour faire l’addition, le garçon compte les bouteilles…
TOUS les Brésiliens terminent TOUTES leurs phrases par Entendeu ? (vous comprenez ?). Comme s’ils avaient besoin d’être certains que leur démonstration est claire. C’est comme le « You know what I mean ? » des Américains.
Rio de Janeiro a été la capitale … d’un pays européen ! En effet, en 1807 la ville est nommée capitale de l’empire portugais, détrônant ainsi Lisbonne qui avait été envahie par Napoléon. Et donc, la capitale du Portugal fut Rio pendant une douzaine d’années.
F. n'aime pas marcher dans la rue avec son alliance, de peur qu'on lui coupe le doigt.
On va au théâtre municipal pour un concert classique expliqué aux enfants. Le speaker : « Le concert durera une heure. » Tous les enfants dans la salle hurlent d’effroi et râlent. UNE HEUUUUUURE !!!
Rio, c’est un peu une ville de science-fiction, un rien figée dans les années soixante. Comme l’explique Olivier, c’est à cette époque que le pouvoir politique est parti à Brasilia et le pouvoir économique à Sao Paulo. La ville est donc restée un peu dans son jus. Qu’est-ce que c’est bieeeeeen…
Ici, c’est toujours un peu compliqué de trouver des légumes (rien que des légumes) au restaurant…
— Euh, je peux vous proposer des frites…
— Beuhpfffff…
— Ou alors des pâtes ? Ça irait, des pâtes ?
— Mais c’est pas des légumes, ça…
— Non , je sais, mais c’est tout ce qu’on a comme légumes…
Souvent, la seule solution c’est de se rabattre sur les buffets au kilo, qui sont généralement assez bons. En ne prenant que les légumes…
Ici, dans une padaria, on a le choix entre uma tartelette et um petit gâteau. Cela étant, même si ça se prononce pareil (petí gatô), le petit gateau est une sorte d’éclair au chocolat à la croûte croustillante et au fourrage crémeux.
Cette histoire délirante m’a poursuivi trois semaines. Je perds ma Mastercard un dimanche. Bon, on fait Cardstop avec ma sœur et je checke sur internet et la société tonitrue partout « qu’elle te renvoie ta carte dans les 48 heures, où que tu sois dans le monde.» On est dimanche et j’appelle Mastercard, je tombe sur un répondeur en néerlandais : « Onze kantoren zijn gesloten, gelieve morgen terug te bellen… » Ok, pas de soucis, les banques néerlandophones ont aussi le droit de se reposer. Le lendemain, je refais le même numéro et une collaboratrice de chez Atos Worldonline m’explique que non, eux ils ne font que les RELEVÉS de carte « mais je vais vous donner le numéro pour appeler Mastercard depuis le Brésil. » Ah cool, merci. Sauf que le numéro qu’elle me donne me renvoie… dans la même société qui me répète qu’ils ne peuvent rien faire pour moi. Pas moyen, donc, de toucher Mastercard, d’où que ce soit dans le monde.
Ok, surtout pas s’énerver…
J’essaie à ma banque (Belfius) qui me propose tout de suite une solution…
— Pas de problème, monsieur Tinlot, on vous envoie votre carte à votre domicile à Bruxelles ! »
— EEEEEEH MAIS NOOOOOON je ne suis pas à Bruxelles, je suis au Brésil.
— Ah ça monsieur moi je ne peux rien y faire, c’est la procédure.
Heureusement, Sandra repasse par la maison quelques jours plus tard. « Alors, tu vas recevoir la carte ET le code par courrier séparé. Veux-tu bien stp activer ma carte et me l’envoyer par DHL, puisque Mastercard ne fait pas son boulot ?”
Sauf que… (j’adore les phrases qui commencent par sauf que, tu sais que ça va partir en sucette). Sauf que, donc, pour recevoir mon code secret, je dois appeler DEPUIS LA BELGIQUE un numéro court à 4 chiffres, et je dois le faire AVEC LE NUMERO DE TÉLÉPHONE QUE MA BANQUE CONNAÎT. Bref, ça marche de nouveau pas. S’en suivent quelques ennuyeuses procédures supplémentaires mais au final, j’ai récupéré ma carte, plus de trois semaines après. Grâce à Sandra mais pas grâce à Mastercard.
Je dois donc être, écoutez-moi bien, le premier type au monde à voyager à l’étranger avec une carte de crédit et à la perdre. C’EST DINGUE, visiblement, ce n’est encore jamais arrivé.
N’importe quoi !