DES NOUVELLES DE RIO DE JANEIRO #2
Ici, le journal gratuit 20 minutes s’appelle Meia Hora (1/2 heure). Soit les Brésiliens lisent plus lentement que nous, soit il se passe plus de trucs ici.
Le hug à la brésilienne (et à mon avis à l’américaine de manière générale) : surtout éviter le plus possible d’embrasser l’autre. Genre je te serre très fort dans mes bras mais j’essaie de garder un bon mètre entre nos deux têtes. Surtout si tu es un homme et moi aussi : j’ai failli me faire expulser du pays parce que j’avais manifesté d’un un peu trop près ma gratitude avec l’un ou l’autre.
L’une des conséquences inattendues de l’invraisemblable niveau de sécurité ici : il y a des gardiens partout, à l’entrée de chaque immeuble d’Ipanema. Mais par contre les gens laissent la porte de leur appartement… ouverte !
Le jour du décès de Ryuichi Sakamoto (😭😭😭), j’ai assisté à un concert du violoncelliste Jacques Morelenbaum, un de ses complices musicaux. Lui-même prononce son prénom… Jaax !
Frias m’explique que jusque dans les années 40, un décret municipal obligeait les gens à porter des chaussures et une veste pour circuler dans certaines rues. Du coup, seuls les riches pouvaient circuler sur les grands boulevards du centre-ville, reléguant les pauvres (les va-nu-pieds, donc) dans les ruelles secondaires.
Niteroi est une ville-dortoir située en face de Rio, on y accède par un pont de 13 km ou en ferry. La ville est truffée d’œuvres d’Oscar Niemeyer, la star de l’archi brésilienne. Mais les autorités fédérales freinent la reconnaissance du parcours officiel dédié à Niemeyer. La raison : Niteroi compte UN bâtiment Niemeyer de plus que Brasilia, la capitale. Et ça, ça fait désordre…
Se faire prescrire des antibiotiques relève ici de la discipline olympique. « Oh tu verras, ici pas besoin d’ordonnance. » (ici, je vous laisse imaginer une expression très vulgaire pour signifier que ce n’est pas du tout le cas). Après avoir noté consciencieusement le numéro de série et la date de péremption de chaque produit au dos de l’ordonnance, le pharmacien m’achève avec cette question : « Dites, dans Thierry Jacques Gérard Walter, quel est votre nom de famille en fait ? »
Je suis extrêmement fier de ce qui suit. Suite à quelques petits ennuis de tuyauterie, je suis donc allé chez le médecin pour la prescription dont je viens de parler. Il se fait que Katia, la médecin qui me reçoit, suit des cours à l’Alliance Française. Je lui parle de mes textes, je les lui envoie. Et hop, me voilà invité à l’Alliance Française pour y parler de mes voyages. Trop bien, voilà le reportage ! Didier, à qui je raconte cette péripétie, commente : « Excellent ! Tu es dans une telle disposition d’ouverture que tout t’arrive. Continue de chevaucher le réel comme au rodéo (non, je n’ai pas pris de drogues). »
Je spotte désormais assez facilement les chauffeurs de taxi bolsonaristes. Après 5 minutes de conversation, ils sortent toujours les deux mêmes phrases, dans le même ordre :
1/ “Il y a tellement de corruption dans ce pays…”
2/ “Et ça va jusqu’au sommet de l’état…”
Spottéééé !
J’ai eu l’occasion d’aller visiter une favela « pacifiée » (toutes ne le sont pas). Rocinha est la plus grande favela d’Amérique latine. Loin de tout voyeurisme, ce tourisme est encouragé par les communautés qui y vivent, car il permet de casser les clichés et de faire rentrer de l’argent dans l’économie du quartier. Le tour est organisé en collaboration avec des programmes sociaux qui favorisent l’éducation et l’autonomie via le sport et la culture.
Et en effet, les clichés explosent vite : ce qu’on peut imaginer a priori comme un sordide bidonville se révèle être un système social extrêmement bien organisé et solidaire (les riches paient pour les pauvres), avec ses écoles, hôpitaux et mille commerces, sans oublier des services du maintien de l’ordre et de voirie. Et dont la plupart des habitants disent n’avoir aucune envie d’aller vouloir habiter ailleurs. Bon, pas d’angélisme : il y a quasi tout le temps des narcos derrière ces organisations, tout le monde le sait et fait avec. Mais, de manière assez surprenante, les habitants des favelas se sentent plus en sécurité dans leur quartier que dans le reste de la ville. On notera enfin que la visite d’une favela n’intéresse pas du tout les cariocas « de la ville » qui ne voient pas pourquoi aller perdre son temps dans un endroit dangereux et insalubre. Chacun voyant donc midi à sa porte…
Pour info, une favela est appelée ici une « agglomération subnormale ». Et en voici la définition officielle : ensemble constitué d’au moins 51 unités de logement (baraques, maisons, etc.) occupant — ou ayant occupé jusqu’à une époque récente — les terrains d’autrui (publics ou privés), disposées en général de manière désordonnée et dense et manquant généralement des services publics et essentiels.
Un dernier truc malin : quand on veut faire du commerce dans une favela, il faut parfois se montrer trrrrrès imaginatif !
Chaque Brésilien rencontré me demande ce que je pense de la nourriture locale. Et moi de m’extasier, en parfait faux-cul, et d’en remettre quelques tonnes dans le genre compliment excessif. Bon, celles et ceux d’entre vous qui ont déjà arpenté l’Amérique Latine savent pertinemment qu’à de rares exceptions, la gastronomie locale ne fait pas partie des 8473 raisons de voyager ici. J’ai souvent l’impression que manger est uniquement ici un acte technique, à peu près aussi excitant qu’aller faire le plein à la station Total.
C’est souvent un peu roboratif (j’ai déjà parlé des 4 ou 5 féculents qui accompagnent systématiquement un repas). Mais bon, j’ai très bien mangé dans certains restaurants inventifs qui revisitent les classiques de la gastronomie locale. A cet égard, je clame dès que je peux mon amour pour Phil Rosenthal et sa merveilleuse série Somebody Feed Phil sur Netflix. C’est d’ailleurs grâce à lui que je pars à Santiago dans quelques jours… Ici, comme à Lisbonne, je suis Phil a la trace et vais manger là où il a mangé. Et c’est juste du bonheur… ce qui évidemment relativise ce que je viens d’écrire. Et c’est tant mieux.
Vu au Mosteiro de Sao Bento : tous les artisans impliqués dans la construction d’une église Bénédictine devaient faire partie de l’ordre.
Qui est le seul gros naze qui, dès qu’il entre trempé de sueur dans le métro ou dans un magasin conditionné à 16 degrés, sort son pull de son sac ? Hm ? A votre avis ?
Je réalise donc une version portugaise de mes textes à destination de mes contacts lusophones ici. Traduction largement générée avec l’aide du traducteur automatique Deepl. Mais que je relis quand même. Et donc, quand je parlais la fois dernière de deux hitmakers (des types qui écrivent des hits), la machine me propose « dois assassinos ». Parfait.