DES NOUVELLES DE SANTIAGO DE CHILE #2
Suite des aventures du Belge moyen au pays le plus long du monde (grosso modo, de la Norvège au Sahara, si vous visualisez). Mais large comme le jardin de ma cousine, hein, attention.
J’ai envie de commencer ce deuxième chapitre sur Santiago en citant mon camarade Olivier qui, avec son épouse Azota, sont un peu mes modèles. Ils sont en effet nomades depuis une dizaine d’années et ont parcouru la terre entière ou à peu près. Pour les remercier de m’avoir tant inspiré, je leur ai par exemple récemment refilé le covid à Rio (c’est malheureusement authentique). Pas rancunier, Olivier écrit ceci sur Santiago :
“Comme toutes ces grandes villes d'Amérique du Sud, Santiago respire la vie. Il y a les bateleurs, les jongleurs, les peintres, les chanteurs, les joueurs d'échec, les marchés aux puces improvisés sur un coin de trottoir, les mendiants, les vendeurs de nourriture à la sauvette, qui grillent leurs brochettes, pressent leur jus de grenade ou vendent des sortes de beignets plats que l'on recouvre de sauce piquante à la tomate. C'est toujours un plaisir de humer, d'écouter, de goûter ou tout simplement de flâner dans ces rues.”
La guerre du Pacifique (1879-1884 entre le Chili, la Bolivie et le Pérou) s’est déclenchée autour de l’accès à deux ressources économiques cruciales : le salpètre (utilisé à l’époque dans la fabrique des munitions)… et LE GUANO ! Oui, le caca de mouettes, qui fait un splendide engrais. Une guerre !!!!
Un peu compliqué : ici au Chili, tomar once (littéralement “prendre 11”) signifie prendre le goûter. Donc, à 16 ou 17h, car même ici, on ne prend pas son goûter à 11h. Allez comprendre ! Une amusante anecdote (merci, José) circule à propos de cette expression : ce serait un code entre des moines qui avaient décidé d’aller boire un coup en douce à l’époque coloniale. En effet, ONCE (onze, donc) c’est le nombre de lettres du mot AGUARDIENTE, l’eau-de-vie locale. Et donc, quand on voulait s’envoyer un petit verre discreto, c’était le code secret : tomar once !
Au petit super du coin, j’achète deux cannettes de bière. La vendeuse me dit « Si vous voulez acheter de la bière, vous devez me montrer votre carte d’identité. » Je trouve ça assez drôle, haha elle est bien bonne, combien je vous dois ? « Monsieur, si vous comptez acheter ces bières, je voudrais voir votre carte d’identité svp. » Ce n’était donc pas une plaisanterie. Juste la loi.
Je n’avais jamais vu ça ailleurs : des Solex « faits maison ». Ce sont des vrais vélos sur lequel on greffe un petit moteur deux-temps, appelé ici motos mosquito. Ce genre de manipulation est totalement illégale… et donc bien entendu on en voit — et on en entend — partout.
On a tous vu des processions de mariage, qui font pouet pouet, avec des rubans qui pendent, qui bloquent la circulation… eh bien ici au Chili même chose mais pour un enterrement. Tout était blanc, même le corbillard ! Mon oreillette me chuchote qu’il pourrait s’agir de la cérémonie funéraire d’un enfant, où en effet tout est blanc, il y a des ballons et tout. Certains enterrements prennent d’ailleurs d’autres atours : quand le membre d’un gang décède, on n’hésite pas à tirer des (vrais) coups de feu en l’air pour célébrer sa mémoire.
Alorrrrs… J’ai déjà eu Cerri, Sherif, Ciefi, Jerry, Shere, Estery, Trery… Voici le grand retour de mon jeu préféré. “A quel nom, votre café ? Thierry. Comment ça s’écrit ? Oh, comme vous voulez…”
D’habitude, quand les Chiliens connaissent la Belgique, c’est grâce à des références footbalistiques. Généralement, la phrase d’après, ils massacrent le nom de Kevin De Bruyne. D’où ma surprise lorsque cet employé d’une compagnie de bus a commencé à hurler dans toute la gare « Eurovision ! 1986 ! Sandra Kim ! » et commence à chantonner ce que vous savez…
Dans les rues commerçantes du centre, des jeunes femmes improvisent des salons de beauté. Un tabouret, un miroir de poche, quelques accessoires de maquillage et voilà !
Je crois que ça n’aura échappé à personne que l’Amérique latine n’est pas l’endroit de la planète où l’on mange le mieux. Je me suis déjà expliqué sur cette impression - qui n’engage que moi, hein — que les Latinos font du repas un acte technique plutôt qu’un moment de plaisir. Raison de plus pour signaler que j’ai pleuré de bonheur en goûtant le pulmay (ou curanto), un plat traditionnel du sud du pays. On y retrouve à peu près de tout : fruits de mer, viande, des légumes… Il se prépare traditionnellement dans un trou creusé dans le sol, chaque couche d'ingrédients étant couverte de feuilles de rhubarbe, de figuier ou de chou blanc.
Autant on dit de Paris que c’est « la ville-lumière » et de New York que c’est « the big apple », je cherchais en ligne le surnom de Santiago. Je n’ai pas trouvé, mais j’ai appris que Bruxelles était surnommée « La Washington d’Europe ». Hahahahahaha, n’importe quoi, jamais entendu ça.
Claudia m’explique qu’elle a un nom spirituel et un nom terrestre.
Je viens de terminer COBRE (cuivre), un roman qui parle d’une chasse à l’homme, en 1973, entre un fidèle de Allende, porteur de secrets d’états destinés à Fidel Castro, et un policier qu’on a chargé de le retrouver. C’est passionnant, ça se dévore comme un polar, c’est évidemment clafi de faits historiques, de références locales et de personnages ayant existé. Et c’est écrit… par un Belge, figurez-vous : Michel Claise, juge d’instruction.
A suivre : Valparaisoooooooooooo, hissez hauuuuuuuut !!!